La foi en l’instruction. La fin du XVIe siècle assiste à l’apparition des bases d'un nouveau modèle éducatif pour les filles à l’initiative d’Alix Le Clerc et de Pierre Fourier. Instruction académique, formation morale et spirituelle. Cette action sociale est une initiative révolutionnaire.
De notre série de podcasts : Les grands noms de l'histoire lorraine
Un projet audacieux qui bouleverse les normes éducatives de l’époque. En 1597, Alix Le Clerc et Pierre Fourier fondent l'Ordre des Chanoinesses de Saint-Augustin de la Congrégation Notre-Dame. Leur mission : créer des structures éducatives dédiées à l’instruction des campagnes, mais surtout à celle des jeunes filles. Un domaine largement négligé jusqu'alors.
Alix Le Clerc, issue d'une famille noble de Remiremont, ressent un appel profond à servir Dieu et la société à travers l'éducation. Sous l'influence spirituelle et intellectuelle de Pierre Fourier, curé à Mattaincourt et fervent réformateur de l'Église, elle décide de consacrer sa vie à cette cause.
« Pierre Fourier est un apôtre du Concile de Trente et incarne cette réforme tridentine selon laquelle le salut passe par l’enseignement. » Gäetan Dechoux*
Ensemble, ils imaginent une école dans laquelle les jeunes filles peuvent recevoir une éducation complète et rigoureuse. Apprendre les mathématiques, les sciences et les arts. Des disciplines rarement enseignées aux femmes de l’époque. L'ordre, dirigé par Alix Le Clerc devenue Mère Thérèse de Jésus, ouvre rapidement des écoles dans la région de Lorraine et au-delà.
L’éducation réformée : une initiative moderne et progressiste
À une époque où l'éducation des filles est limitée et souvent négligée, leur vision d'une instruction complète et égalitaire est radicale. Ils croient fermement que les filles méritent la même qualité d'éducation que les garçons. Une idée qui remet en question les normes sociales et religieuses de leur temps. Cette approche inclusive ouvre de nouvelles perspectives pour les jeunes filles, leur offrant des opportunités auparavant inaccessibles. Ils adoptent également des méthodes d'enseignement modernes, axées sur la compréhension et le développement intellectuel des élèves, plutôt que sur la simple mémorisation.
« Il y a des innovations pédagogiques qui sont, encore aujourd’hui, appliquées. La méthode de l’enseignement simultané par exemple, c’est une chose totalement nouvelle, mise en place par Alix Le Clerc et Pierre Fourier. » Gäetan Dechoux
Ce modèle éducatif est accessible à toutes, indépendamment du statut social. Il contribue ainsi à l'élévation sociale et intellectuelle des femmes.
Plus qu’un héritage, les premiers pas de l’évolution de la condition des femmes
L’ordre des Chanoinesses de Saint-Augustin de la Congrégation Notre-Dame, connaît une expansion rapide et durable. Les écoles qu'ils fondent, prospèrent et deviennent des centres d'excellence éducative, reconnus pour leur rigueur académique et leur formation morale. Ils poursuivent leur œuvre jusqu'à leurs décès. Leur travail est reconnu par l'Église : Pierre Fourier est canonisé en 1897 et Alix Le Clerc est béatifiée en 1947.
Les institutions qu'ils ont fondées continuent de fonctionner, incarnant les valeurs d'excellence, de discipline et de charité qu'ils ont prônées. Leur vision d'une éducation inclusive et égalitaire a pavé la voie à des réformes continues dans le domaine de l'éducation des filles.
« Il y a un enjeu des mœurs et de l’éducation. Cela va vraiment devenir leur cheval de bataille. » Gaëtan Dechoux
Alix Le Clerc et Pierre Fourier restent des figures inspirantes, symboles de l'innovation et de la foi au service du progrès social et éducatif.
* Gaëtan Dechoux, doctorant en histoire moderne à l'Université de Lorraine, est actuellement en préparation de thèse sur "Religions et coexistence confessionnelle au sein des armées du roi de France (XVIIe-XVIIIe siècle)".
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