Vingt-trois ans après le succès monumental de Gladiator (2000), Ridley Scott revient avec Gladiator II, une suite audacieuse qui plonge à nouveau le spectateur dans les tumultes de la Rome antique au début du IIIe siècle. Porté par une nouvelle génération d’acteurs et une ambition visuelle renouvelée, ce second opus tente de réinventer le genre du peplum tout en honorant l’héritage de son prédécesseur en se moquant bien d'être anachronique.
L’histoire reprend plusieurs décennies après la mort tragique de Maximus (Russell Crowe), centrée cette fois sur Lucius, neveu de Commode et fils de Lucilla, la fille de Marc Aurèle. Adulte, Lucius (Paul Mescal) est confronté à des intrigues politiques et à un empire en proie à des divisions internes. Le récit explore son ascension, sa quête de justice et son rapport complexe à l’héritage laissé par Maximus, qui continue de hanter l’imaginaire collectif. Si l’intrigue s’inscrit dans la lignée du premier volet, elle tente également d’étendre l’univers en offrant une perspective plus large sur Rome et ses provinces. Ce choix permet d’enrichir le récit mais s’accompagne parfois d’une dispersion narrative qui dilue l’intensité émotionnelle qui faisait la force de Gladiator.
Ridley Scott démontre une fois de plus sa maîtrise visuelle, offrant des scènes grandioses qui captivent par leur beauté et leur réalisme. Les arènes, les batailles et les décors de la Rome antique sont restitués avec une minutie impressionnante, renforcée par des effets spéciaux modernes. La photographie de Dariusz Wolski sublime ces tableaux, oscillant entre ombre et lumière pour refléter les dilemmes moraux des personnages.
Cependant, on pourrait reprocher au film de trop s’appuyer sur la grandeur visuelle au détriment d’une narration plus resserrée. Là où Gladiator frappait par son efficacité, Gladiator II semble parfois se perdre dans sa propre ambition.
Paul Mescal livre une performance solide et nuancée dans le rôle principal, incarnant un Lucius à la fois vulnérable et déterminé. À ses côtés, Denzel Washington brille en antagoniste ambigu en jouant un Macrin avide de pouvoir. Quant à Caracalla et Geta, les deux frères empereurs sont les méchants du second volet. Incarnés respectivement par Fred Hechinger et Joseph Quinn, ils apparaissent comme les sales gosses de Rome, dévorées par l'ambition, la corruption et une violence omniprésente.
Au-delà de son récit, Gladiator II interroge la place du péplum dans le cinéma contemporain. Ce genre, autrefois emblématique, avait presque disparu des écrans, éclipsé par des productions plus modernes. Avec ce film, Ridley Scott montre que l’antique peut encore séduire, mais il le fait en s’adaptant aux attentes d’aujourd’hui : un récit plus inclusif, des personnages féminins renforcés et une exploration des zones grises de la moralité.
Pour aller plus loin :
FORNI, Pierre, Caracalla - Père de la citoyenneté universelle ?, Paris, Ellipses, 2021.
FORNI, Pierre, Les Sévères: Septime Sévère, Caracalla, Geta, Elgabal, Alexandre, Paris, Ellipses, 2022.
TEYSSIER, Eric, Gladiateurs, Paris, Glénat Livres, 2024.
VIRLOUVET, Catherine, Rome, cité universelle: De César à Caracalla 70 av J.-C.-212 apr. J.-C, Paris, Belin, 2018.
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